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 Not a visible enthusiasm but a hidden one, an excitement burning with a cold flame.

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Silke
Silke

Pseudo : Lyn
Crédits : Maquizz
Avatar : Imogen Poots
Ici depuis le : 27/11/2013
Messages : 84

Âge du personnage : 23 ans
Ascendance : Sang-mêlée
Statut : Troque parfois des élixirs ou des potions contre des objets
Particularités : Aucune, si ce n'est qu'elle a appris à user de la magie informulée par la force des chose. Elle semble avoir un lien particulier avec son environnement et la nature.
Dédoublement de personnalité : Asta La Rousse!
Points : 15

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(#) Mar 14 Jan - 7:59



Not a visible enthusiasm
but a hidden one, an excitement burning with a cold flame.


Participants • Cahir & Silke
PNJ ? Pas de PNJ, mais Siri est pas loin.
Statut du sujet • Privé
Date, mois, année • 2 Janviers 1296
Lieu • La ferme de Siri Freknur et les alentours.
Moment de la journée • Début d'après-midi.
Météo • -18°C - Soleil rare, neige, vent froid.

Je ne souhaite pas que les Nornes interviennent dans ce sujet
(à noter que dans le cas d'un sujet d'intrigue, vous n'aurez pas le choix)
photographie ©a room of my own
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Silke
Silke

Pseudo : Lyn
Crédits : Maquizz
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Ascendance : Sang-mêlée
Statut : Troque parfois des élixirs ou des potions contre des objets
Particularités : Aucune, si ce n'est qu'elle a appris à user de la magie informulée par la force des chose. Elle semble avoir un lien particulier avec son environnement et la nature.
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(#) Mar 14 Jan - 7:59

Avant ce jour, Silke n'avait jamais vu le Noregr. A vrai dire, en dehors de sa petite cabane, du Jutland et des quelques visiteurs et potentiels acheteurs qui venaient jusqu'à elle, la Sauvage n'avait pas vu grand chose du Monde. Durant de longues années, Siri Freknur, la jolie rousse, aussi jolie que toutes les Raudi, avait posé la question, à chaque visite ; lui avait proposé mille fois de la rejoindre, de l'accompagner jusqu'à sa ferme, de découvrir un autre bout du monde et d'y vivre. Mille fois Silke avait dit non, malgré les récits tous plus attrayants les uns que les autres : les grosses neiges de Vetr, les champs clairs mais froids, toujours, de Sumar, les moutons colorés par la magie, qu'il fallait tondre, dont elle voulait, malgré tout ce qu'elle pouvait bien dire, apprendre à tisser la grosse laine si douce. Bien des choses valaient le détour dans le Noregr, dans cette partie, plus précisément, de ces terres gelées. Bien des choses auraient pu la décider, durant toutes ces années, à quitter sa cabane pour découvrir une autre vie ; ce que les gens auraient appelé une « vraie vie ». En préparant ses quelques affaires qu'elle avait glissé dans un baluchon confectionné par ses soins, Silke avait encore une fois était prise d'une doute terrible. S'éloigner de sa cabane signifiait... Retourner à ce qu'elle avait quitté des années auparavant, ce dont on l'avait éloigné, ce dont elle avait fuit, en courant, courant encore à travers les bois, enfant rongée par la terreur. Quitter cet endroit ne serait-ce que pour quelques jours réveiller en elle cette peur incontrôlable, dont elle ne pouvait se souvenir la source. Sa vie parmi les hommes n'était qu'un vague nuage blanc, laissant entrevoir ici et là un visage, une légende, l'assurance d'un passé qu'elle ne souhaitait pas connaître, pour le moment.

Rassurée par les paroles et l'affection de Siri, elle avait fini par mettre un pied dehors, puis un autre, encore un autre, allant jusqu'au portail runique. La neige jusqu'aux chevilles, elle avait pu admirer, de loin, la ferme Freknur qui lui paraissait immense, à côté de son petit chez elle. Alors c'était ça, l'antre de Siri. La paix de l'endroit frappa la sauvageonne qui s'en retrouva presque immédiatement apaisée ; de la fumée s'échappait de la demeure, comme si un feu la réchauffait, mais elle n'y fit pas attention, et suivit son amie jusqu'à la grande demeure étrangère. Il lui fallut bien quelques heures avant d'arriver à se mouvoir librement. Il y avait tant d'espace, tant de pièces ; l'une d'entre elle lui était réservée, et Silke put y déposer ses affaires, s'y perdre pendant quelques instants en observant les murs, y passant la main pour constater de leur solidité. C'était donc ça, avoir un toit, un vrai. L'enfant n'était pas envieuse, simplement pleine d'une curiosité matinée de cette crainte sourde qui ne la quittait pas. On la fit manger, et boire un peu, pour la préparer à la visite des lieux. Elle ne put se retenir bien longtemps, et demanda à admirer les moutons de couleurs, ces bêtes dont on lui avait tant parler, et qui l'émerveillèrent d'autant plus lorsqu'elle put glisser ses doigts dans leurs toisons. Quelques instants elle en oublia l'angoisse, et se prit à parler, à poser un tas de questions qui les retinrent, Siri et elle, toute une heure dans la grange.

La lumière attaqua ses yeux lorsque enfin elle sortit ; elle ne remarqua pas tout de suite l'homme qui se tenait non loin, et qui observait. Clignant un instant des paupières, elle s'assura qu'elle ne se trompait pas en jetant un regard interrogateur à Siri qui hocha la tête. Cahir. Avec l'approbation de la maîtresse des lieux, Silke fit quelques pas à peine entravés par la neige et la peau épaisse qu'on avait jeté sur ses épaules pour lui tenir chaud. Elle se retrouva, tout à coup, devant l'homme qui était, un jour, tombé devant sa porte ; à dire vrai, il s'était même effondré dans sa petite cabane à la porte pas bien solide. Le visage de la Sauvage afficha un sourire, à la fois surpris, marqué, encore, par ce malaise qui avait du mal à la quitter. Sa main indiqua les côtes de l'étranger, et son doigt s'arrêta juste avant le tissu ; l'ours avait, à cet endroit, arrachait de longs lambeaux de peau, de ses griffes, et il avait fallu bien des sorts et bien des élixirs pour réparer les chaires. Son regard clair rencontra le visage, marqué d'ombres violacées qui lui firent froncer les sourcils ; dans quoi s'était-il fourré, cette fois ? Siri n'avait pas beaucoup parlé, peut-être pour lui réserver la surprise. Elle, Silke, la Fille de la Forêt qui ne parlait pas, qui vivait dans un silence presque parfait, semblait chercher des mots que lui pourrait comprendre. « Visage? » Elle désigna sa propre face d'un geste vague, sans vraiment quitter des yeux les bleus et traces évidentes de coups.

Le temps n'était pas clément ce jour là, et les nuages menaçaient la petite cabane d'une pluie lourde. Le froid mordant risquait de geler les sols, au matin, et Silke était persuadée de ne pouvoir trouver les plantes dont elle avait besoin pour ses potions. Il fallait penser à rentrer du bois, et à mettre ses quelques réserves à l'abri... Corbeau allait avoir besoin de nourriture, s'il devait voler jusque chez Eric Vondr par un tel temps. Son regard se porta sur Cahir, étendu sur sa couche, qu'elle lui avait naturellement cédé. Cela faisait quelques heures à peine qu'il s'était endormi, et la fièvre était encore forte. Par instant, elle venait rafraîchir son visage, visiblement amaigri, et s'assurait de temps à autres de l'état des cataplasmes qu'elle avait déposé sur ses plaies. Près du feu, écrasant quelques ingrédients dans son mortier, elle ne pouvait s'empêcher de l'observer et de se demander comment il était arrivé jusqu'ici.

Silke pointa du doigt le grand homme, avant de mimer quelque chose qui semblait vouloir signifier le sommeil. « Dormir, ici? » Lui aussi, avait trouvé refuge auprès de la Freknur ? Cela n'étonnait pas la jeune femme ; Siri aurait recueilli trois Cahir, et tout autant de Silke, si elle avait croisé leur chemin. Ne pouvant s'empêcher de fixer le drôle de visage qu'elle connaissait par cœur maintenant, après des jours et des jours d'observation silencieuse, elle ne se rendait compte ni du froid, ni du temps, ni de son sourire, étrangement mêlé à son inquiétude, et à la peur qu'elle oubliait, un peu.


Dernière édition par Silke le Jeu 6 Fév - 12:26, édité 1 fois
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Cahir
Cahir

Pseudo : Appo
Crédits : Eden Memories
Avatar : Nikolaj Coster-Waldau
Ici depuis le : 10/12/2013
Messages : 63

Âge du personnage : Quarantaine.
Ascendance : Sang-mêlé
Statut : Rôdeur.
Particularités : Possède une baguette.
Cicatrices.
Points : 15

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(#) Jeu 6 Fév - 0:10

La révolte des impurs. Cahir a traversé tout un pays, toute une mer pour éviter que la violence ne lui tombe sur la gueule de façon injustifiée; s'est préservé pendant ces dernières années, le visage dans l'ombre et la suie, le prénom prononcé le moins possible, s'est paradoxalement privé de vie pour survivre en devenant un anonyme, tout ça pour se faire détruire en mille morceaux par un troupeau d'intolérants au nom d'une révolte qu'il n'a jamais tenu à soutenir. Dans le clan d'où vient Cahir, la pureté du sang n'a aucune importance. Que le pays barbare dont ses pieds foulent le sol à présent ne pense pas de la même manière lui importe peu. Il est constamment en mouvement, vagabond, détaché des terres qu'il traverse. Ce conflit, ce n'est pas le sien. Lui, il se bat d'homme à homme. Il n'a pas besoin de partir en meute battre jusqu'au sang des individus isolés au nom d'un principe dérisoire, d'une croyance invisible. Alors subir les conséquences d'un combat qui va à l'encontre de tout ce qu'il pense, de sa manière d'être l'enfonce encore plus dans l'abattement. Et puis, il y a aussi qu'une nouvelle fois il s'est retrouvé impuissant, mis à terre sans n'avoir rien pu y faire. Un homme plus âgé, un ours, un groupe de sangs purs assoiffés de celui de sa race. Jusqu'où le ridicule irait? La prochaine fois ce serait une bande d'ours? La pensée, aussi ridicule soit-elle, n'arrive même plus à tirer un sourire du pauvre visage meurtri de Cahir. Une seule autre réflexion l'obsède, de l'ordre de la décision et non de l'apitoiement. La prochaine fois, s'il doit y en avoir une, il mourra. Ou plutôt, il se laissera mourir. A quoi bon, pour un guerrier, vivre sans être capable de se battre et de gagner? Ou va un homme comme lui sans un constant arrière-goût de victoire dans la bouche? Nulle part. Il erre sur la plaine déchirée comme une âme en peine dont les pas ne sont plus habités. Il s'arrête à un endroit et tombe comme un objet qu'on a utilisé à son maximum et qu'on jette. Il est inutile, mérite d'être tué.

Bien sûr, il est reconnaissant envers Siri. Elle l'a recueilli malgré ses a priori contre lui, malgré la barrière de la langue, ne s'est même pas posé de questions. Mais le fait qu'elle soit - précisément elle - la personne le trouvant dans un état aussi misérable et qu'elle le guérisse comme s'il ne pouvait pas le faire lui-même (bien sûr, c'était le cas, mais il aime se raconter des histoires pour aider son orgueil déjà claudiquant) le tue encore plus. Généralement tapi au fond de la grange, à essayer d'aider sans trop la fréquenter, il se débrouille pour l'éviter coûte que coûte. Il devrait ne lui montrer que de la gratitude mais est tout juste capable de n’être qu’irrité par sa présence,  et plus souvent colérique sans vouloir le révéler. Il se dit que de toute façon, elle doit penser qu’il met beaucoup d’espace entre eux deux pour ne pas avoir à montrer ses blessures à une femme, qu’il est orgueilleux de sa beauté momentanément cabossée. Il se ment souvent pour faire des compromis avec sa propre humeur. Un guerrier sentimental. Le corps trop musculeux d'un lâche. Son œil gauche poché, les marques des coups de pieds, de poings, violacées par le temps sur l’intégralité de son visage. Et bien sûr, au contraire des jeux de bagarre des enfants, ses agresseurs n’avaient pas pris en compte ses blessures déjà existantes, à peine guéries. Invisibles sous ses vêtements, certaines griffures de l’ours s’étaient rouvertes, comme pour lui rappeler tous ses démons. La seule chose positive dans le fait d’arriver dans le Noregr avait finalement été la température catastrophiquement froide. Gelant ses blessures, elle anesthésiait la douleur de ses plaies dans la mesure du possible. Il n'y a plus, chez Cahir, d'économie dans les sujets de réjouissance. Trop rares. Trop fades.

Aujourd'hui ne déroge pas à la règle. Il fait terriblement froid, et Cahir ne reconnaît plus la forme de son corps sous les épaisseurs de peau de bête qu'il a accumulées - deux à lui, une que Siri lui a prêté Tant mieux. Mais il fait aussi très beau, le soleil s'infiltre dans ses cheveux blonds lavés il y a peu de son propre sang. Le soleil réchauffe son visage meurtri, et c'est étrangement assez agréable malgré les tiraillements de sa peau. Il sait que Siri n'a pas compris qu'il a compris. Qu'elle croit avoir été trop évasive dans ses gestes pour être explicite, et qu'il ne sait pas que Silke va venir. Non, en vérité la seule chose qu'il ne sait pas c'est quand, et l'irritation constante qui l'habite depuis cette troisième atteinte à son corps s’entremêle de fébrilité de ne pas savoir pour quand il doit se préparer, enfiler sa peau de type décent à la place de celle du misérable éclopé qui a pris un coup dur à la vie. Ce n'est pas une fébrilité d'adolescent face à son premier flirt, c'est la fébrilité inquiète du type qui ne veut pas décevoir, ou blesser. C'est incompréhensible, mais c'est comme ça. Qu'elle le retrouve tout cassé lui donne l'impression qu'il se présente à elle en ayant démoli son œuvre, ses soins. Qu'elle l'a remis longuement sur pied et que n'ayant aucune considération pour ça il est allé se faire casser la gueule comme un gamin trop ivre de bagarre. Il devrait n'avoir aucune dette envers elle et pourtant s'en sent une énorme.

Et voilà qu'elle paraît. Que c'était précisément aujourd'hui, et que tant pis, elle va le voir encore bien amoché. Il n'a aucun mot pour s'excuser, légitimer ses hématomes. Elle paraît encore plus fine sous ses immenses couches de vêtement vouées à combattre l'impitoyable Noregr. Elle illustre ses propos de son visage étrange et pourtant harmonieux, qui perturbe encore beaucoup Cahir qui ne comprend pas comment ça fonctionne, une sauvageonne pareille - c'est à dire, ce tout petit bout de fille dont on ne donnerait pas cher et qui pourtant survit vaillante. Sa bouche généreuse est celle d'une héritière de haute famille, pas celle d'une ermite des bois accueillant sans s'effaroucher un gros ours de type absolument inconnu dans sa maison, dans son lit, sous ses soins. Voilà, sauvageonne, moi je suis pire que toi, j'ai été élevé en clan mais je n'ai pas de mots pour t'expliquer. Ou plutôt, si, une formule qu'il a appris de la bouche de Siri, par laquelle il a compris ce qui lui était tombé sur la tête. Appliqué, il articule à travers les méandres de son accent, plaque les mots de l'air le plus sérieux du monde, parfaitement immobile. Révolte des impurs. Il laisse un long silence, pendant lequel, au lieu de baisser les yeux, il la fixe droit, net. Hésite à ouvrir la bouche à nouveau pour en laisser sortir ce douloureux langage difficile à articuler. Oui, oui, je dors là. Comment continuer à parler - comment lancer une conversation quand on ne peut pas vraiment y prendre part - comment reprendre les choses avec une personne aussi précieuse une fois sorti du décor habituel? Merci. Pauvres étrangers, soldats des clichés que leur faible niveau de langue les force à emprunter. Il n'empêche qu'il ne se souvient pas l'avoir jamais vraiment remerciée par un mot puisqu'il ne le connaissait pas, d'abord. Et ensuite, il ne voit pas trop d'autre manière d'essayer de dire que les nouvelles blessures, ce n'est pas de sa faute. Que ce gâchis de soin, d’onguents et de temps n'est pas de son fait.
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Silke
Silke

Pseudo : Lyn
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Âge du personnage : 23 ans
Ascendance : Sang-mêlée
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(#) Jeu 13 Fév - 0:25

Siri ne lui avait rien dit. Elle ne l'avait pas prévenu du nouvel invité, de l'homme qu'elle hébergeait alors que la jeune sauvage était persuadée qu'elle le détestait. Le mot était peut-être un peu fort, mais Silke n'était pas aveugle ; elle n'avait pas apprécié trouver l'étranger dans la cabane, n'avait pas tardé pour trouver un moyen de le faire partir, de rendre à Silke son isolement habituel. Quelqu'un d'autre aurait pu en vouloir à la bergère, pour x raisons imaginées ou bien réelles ; pas la blonde, car elle comprenait. Elle comprenait la méfiance, et ce besoin viscéral de protéger, d'éloigner tout danger et de préserver ; elle comprenait, mais aurait préféré veiller encore un peu sur son malade, son grand bonhomme blessé qui avait passé la porte avec brusquerie mais était resté avec calme et mesure. Tout aurait pu beaucoup plus mal se passer, pour l'un comme pour l'autre, peut-être plus pour Silke encore. Ils avaient, au lieu de ça, cohabité silencieusement et un peu maladroitement au début. Du moins lorsqu'il avait ouvert les yeux à nouveau, tiré de son inconscience par quelques bruits que la sauvage pouvait faire en cuisinant, qui avait préparé avec attention ces repas qui n'étaient pas destinés à elle et elle seule. Siri mangeait parfois avec elle, et Silke prenait toujours soin de faire de son mieux ; avec Cahir, il avait fallu faire consistant mais assez léger pour ne pas mettre plus à l'épreuve son corps fatigué. Avec lui, il s'agissait de lui rendre sa force, sa droiture, le soigner et le redresser, le remettre sur pied ; si elle pouvait physiquement tentait de rebâtir ce drôle d'homme venu de loin, l'enfant sauvage avait bien compris qu'elle serait impuissante à lui rendre ce que l'ours avait arraché. Elle ne saisissait pas la fierté des hommes, ne la comprenait pas encore parfaitement, tant elle en rencontrait peu. Tant elle n'était pas du même monde.

Mais il se tenait là, bel et bien debout, face à elle, dans la neige. Le froid mordant piquait ses joues et ses lèvres, qu'elle n'avait pas pris la peine de protéger ; lui non plus d'ailleurs. Il se tenait là, bel et bien debout, et encore amoché. Silke savait compté, savait que les jours s'étaient écoulés depuis qu'il avait quitté sa cabane pour regagner la ville, et avec ces jours, les traces avaient du disparaître. A nouveau, il s'était heurté à la violence d'autrui, et la sauvage ne savait pas pourquoi. Un œil enflé n'était pas l'oeuvre d'un loup, pas plus que les soins qui lui avaient été prodigués par d'autres mains que les siennes ; Siri, peut-être. Siri, certainement, qui s'était occupé de lui, lui avait offert un toi malgré la méfiance. Révolte des impurs. La ride de contrariété sur le front de Silke se creusa un peu plus. Bien sûr, la bergère lui avait parlé de ce qui s'était passé la nuit de Jol, et elle la soupçonnait d'avoir voulu la mettre à l’abri en la ramenant à la ferme. Une foule de questions se bousculèrent dans sa tête, se heurtèrent à ses lèvres closes. A vrai dire, elle les ouvrit un instant, comme prête à dire quelque chose, ne trouva pas ses mots et se souvint que Cahir ne comprendrait pas, si elle l'abreuvait de questions en tout genre. Et sa frustration apparut tout à coup, bien vive et bien réelle ; pour la première fois, Silke se retrouva frustrée de ne pouvoir parler, de ne pouvoir laisser libre cours à toutes les interrogations et les inquiétudes qui venaient de l'assaillir. Révolte des impurs. Comment s'était-il trouvé pris dans cette histoire ? Pourquoi lui ? Etaient-ce des sang-purs, des imbéciles sectaires et butés, qui s'en étaient pris à lui ? Avait-il fait partie des dommages collatéraux de l'attaque de Grim et des siens ?

Siri devait savoir. Siri savait tout, toujours, elle savait tout ce que Silke avait besoin de savoir, et lorsque ce n'était pas le cas, la sauvage avait tendance à l'oublier. Mais ça, ça, elle lui dirait, elle en était certaine, puisque lui aussi, dormait ici, lui aussi trouvait refuge à la ferme Freknur. Ils allaient ainsi se voir. Cette configuration paraissait presque étrange à la jeune femme qui n'avait fréquenté Cahir qu'entre les quatre murs de sa cabane, et quelques arbres de la forêt lorsqu'il avait eu assez de force pour se lever et l'aider à couper un peu de bois, pour le feu. Son remerciement, teinté de l'accent de ses terres, la tira de ses pensées presque brusquement. Merci, pour quoi ? Silke cligna des yeux, comme si elle ne comprenait pas. Comme si elle aurait agi de la même manière pour tout le monde, pour n'importe quel homme franchissant son seuil au bord de l'inconscience, le torse ouvert et sanglait . Voila qui était bien faux. Elle finit par afficher un fin sourire, ses épaules frêles se haussèrent comme si ce n'était rien. Comme si c'était normal. Un instant d'hésitation, et sa main fine et froide se leva, avança jusqu'au visage abîmé, hésita à nouveau. Silke déglutit,   observa l'étranger, attendant son accord, son approbation avant de poser une main sur son visage, puis l'autre. Les mots ne passèrent pas ses lèvres, les runes furent tues, à peine invoquées, à peine esquissées, dans son esprit. Il s'agissait d'autre chose, d'une force naturelle et fluide glissant sous la peau, d'une énergie  vive et chaude, que Silke sentait, savait présente, au bout de ses doigts, dans le creux de ses mains, et qu'elle n'utilisait que rarement. Par crainte, peut-être, de ce qu'elle ne s'expliquait pas, de cette magie qui ne lui demandait ni de parler, ni de combiner quelques mots ancestraux pour se manifester. Bientôt, les derniers hématomes se rétractèrent, jusqu'à disparaître, laissant la peau presque intacte. Alors elle recula, presque surprise de son propre fait, les mains suspendues un instant là, entre eux. Elle ne put s'empêcher de le regarder, encore un instant.

Une violente chaleur, comme une impression de brûlure s'empara de ses mains, de ses paumes, plus précisément, et Silke les observa : rouges. Toutes rouges, comme passées au fer, rouges comme des gerçures toutes neuves, alors elle recula à peine et plongea ses mains dans la neige, en ramassa une boule qu'elle façonna de ses doigts avant de faire quelques pas. La glace apaisa bien vite la douleur sur laquelle elle ne s'arrêta pas, l'esprit occupé à tout autre chose ; son regard sur porta sur Cahir, et son sourire se fit plus franc, son appréhension peut-être plus discrète. Elle attendit, patiemment, qu'il accepte de faire quelques pas en sa compagnie, à défaut de pouvoir partage bien plus de mots.
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