Un jour, il y a de cela 20 ans, le navire où était Bartram est arrivé sur les côtes de l'Ouest ibérique. Le raid s'est passé sans encombre, sur un village de sorciers de piètre qualité. Et en remontant à bord du navire, le capitaine s'est rendu compte qu'il avait un passager supplémentaire : Ornelo avait profité du chaos provoqué par la descente des scandinaves pour s'enfuir de là où il était retenu en otage. Il ne parlait pas la langue de ces hommes du Nord, sentait bien qu'il y avait une réticence à l'accepter à leur bord, et puis un jeune homme qui devait avoir à peu près son âge et les cheveux très noirs a parlé de manière énergique, et le capitaine du navire a accepté de le faire monter à bord. Ornelo ne sut jamais vraiment ce qu'avait dit Bartram Oddi pour lui permettre de monter sur le bateau, il soupçonne une promesse d'esclavage, mais arrivé à Skuli, il ne fut pas débarqué comme les esclaves. Il suivit Bartram jusqu'à une taverne où ils burent longtemps, et ne parlèrent pas. Ou plutôt, Bartram Oddi lui parlait, mais Ornelo ne comprenait pas encore ce qu'on lui disait.
Avec le temps, Ornelo a appris le norrois, avec difficultés et erreurs, mais il peut désormais le parler convenablement. La raison pour laquelle il n'a jamais été réduit en esclavage était que les Scandinaves sentaient la magie affluer de cet homme, et se doutaient bien qu'il était sans doute aussi puissant qu'eux.
Ornelo a voyagé, après un ou deux ans passés à Skuli auprès de Bartram Oddi et sa jeune épouse. Et puis, il a senti le besoin de voyager, de voir le monde, de découvrir tous les recoins cachés de la Scandinavie magique. Il s'est embarqué sur un navire, a fait mine d'être muet, et a débarqué là où on voulait bien poser l'ancre. Lui et Bartram se voient régulièrement, et, même si Ornelo sait parler le norrois, ils ne parlent pas forcément plus qu'avant. Ou plutôt, ils se racontent leurs vies, leurs légendes respectives, et partagent ainsi leurs deux cultures. Les récits de l'Afrique de l'Ouest parviennent ainsi à Bartram, qui en échange a pu raconter tous les mythes fondateurs de la Scandinavie à Ornelo.
C'est d'ailleurs Bartram qui a conseillé à Ornelo de prendre un nom de famille scandinave, et l'a ainsi rebaptisé Ornelo Aslak (le jeu des dieux), en souvenir d'une rencontre imprévue et surprenante. Ornelo, pour sa part, ne se considère pas comme le jouet des dieux, et considère plutôt son existence comme une succession de hasards heureux (plus ou moins).