Elle avait lié sa vie à lui, invoquant une vieille magie oubliée de tous. Elle avait lié sa vie à lui pour l'éternité, choisit d'emprunter les mêmes chemins tortueux et sombres. Elle avait choisit d'être la lumière qui le guiderait où qu'il aille. Elle avait choisit de l'attendre pour qu'il soit un jour complètement à elle. Elle l'avait choisi. Elle avait choisi de l'aimer lui.

Et pourtant, c'est elle qui lui prit la vie. Cette vie qu'elle chérissait par delà tout ce qu'on pouvait imaginer, par delà tout ce qu'on pouvait nommer. Parce qu'ils n'étaient pas juste amants, ils n'étaient pas juste amis. Ils formaient un tout, un être divisé en deux personnes qui partageaient un espace vital commun, qui agissaient en résonance, qui se complétaient parfaitement, qui bougeaient avec une fluidité déconcertante. Deux personnes qui formaient un parfait équilibre. Le soleil et la lune, la nuit et le jour. Une partition qui se déroulait lentement, un parfait quatre-mains.

A deux, ils auraient pu conquérir le monde, elle le savait. A deux, tout devenait possible, les chemins qui s'offraient à eux devenaient millions et chaque choix était le bon. Elle ne craignait rien, en sa compagnie, se sentait forte et prête à tout affronter, tant qu'il marchait à ses côtés. Tant qu'elle sentait son odeur, tant qu'elle percevait les battement de son cœur, tant qu'elle savait qu'elle n'avait qu'à tendre le bras pour le toucher.

Mais parce que leur équilibre était précaire, parce que d'autres forces les entouraient, plus fortes que le lien fort et puissant qui les reliait, il sombra un peu plus dans l'ombre et elle fut un peu plus attirée par la lumière.

Parce que leur dualité ne tenait pas uniquement en deux personnalités qui n'apaisait qu'une fois ensemble, en deux êtres qui ne s'équilibraient qu'une fois réunies. Leur dualité s'exprimait par deux clans ennemis qui jamais ne pourraient connaître la paix.

Ce ne fut pas son choix, non. Jamais elle n'aurait pu se résoudre à le tuer, se condamnant ainsi à assassiner une partie d'elle. Non, ce ne fut pas son choix. Mais un terrible accident.

Quand il mourut, le sourire aux lèvres -il venait de lui affirmer qu'elle serait toujours la lumière qu'il chercherait, où qu'il aille, il venait de lui promettre de se retrouver un jour, il venait de lui jurer qu'ils seraient à nouveau uni pour ne plus jamais être séparés – elle sentait son être se déchirer, littéralement. On venait de lui retirer, d'un coup, une partie d'elle-même, on venait de l'amputer de la moitié de son être.

Elle n'eut que peu de temps. L'esprit hagard, perdu, embrumé, elle jura de vivre avec la part d'ombre qu'il avait toujours porté, elle promit de vivre pour lui, pour deux. Elle arracha le petit poignard de sa poitrine et tourna les talons après avoir prononcé les mots qui l'accompagnerait dans son autre vie et s'en fut. Déjà, elle sentait cette magie ancienne et étrange opérer, et la nature lui devenait hostile, et la terre ne voulait plus d'elle.

Elle chevaucha des jours entiers, ne s'arrêtant que pour ménager sa monture, fuyant sa patrie qu'elle ne pourrait plus jamais rejoindre.

Depuis, elle n'est jamais vraiment tranquille et sereine que sur les flots.

Elle vit avec sa malédiction et s'en accommode. Elle a choisit de vivre pour lui, pour lui raconter cette vie qu'ils auraient mener à deux quand ils seront à nouveau réunis. Car malgré tout, elle tiendra sa promesse, l'éternité sera à eux.

Là où le regard ne porte pas, ils seront réunis pour toutes les vies à venir.